La quatrième journée de la semaine de la transition laissait place aux réflexions sur l’hydrique dans le futur, un enjeu majeur de la transition écologique en Ardèche.
Résumé de la journée - Transition hydrique
Ouverture
La question hydrique est au cœur de celle des changements climatiques. Afin de pouvoir sécuriser la ressource en eau, Laurent Ughetto a rappelé en introduction sa volonté de voir tous les acteurs mais aussi les Ardéchois, prendre part à une stratégie commune de gestion de la ressource en eau.
Christine Malfoy, conseillère spéciale en charge de l’environnement, des grands sites, de l’énergie et des ENS (Espaces Naturels Sensibles) a évoqué l’enjeu de cette journée. Il n’est pas de convaincre les experts de l’urgence de la situation mais de traduire ces questions et les enjeux auprès du grand public. Pour cela, il faut travailler à l’Ardèche dans 30 ans mais aussi travailler sur des aspects plus concrets et immédiats. Voilà les enjeux de la journée.
Avoir accès à une eau courante de qualité est le résultat d’un engagement public des entreprises, des élus, des associations, syndicats et institutions a rappelé Pascal Bonnetain. Président de l’EPTB du Bassin versant de le d’Ardèche, Pascal Bonnetain est aussi vice-président du conseil d’administration de l’AERMC représentant le collège des collectivités territoriale. Pour lui, l’Ardèche a réussi à prendre de l’avance sur ces questions mais il est important de renouveler nos actions et logiques de réflexion pour s’assurer que l’on réponde aux besoins et exigences de demain. La transition hydrique ne concerne pas que la seule politique de l’eau mais aussi l’agriculture, le tourisme, l’activité économique au quotidien. Les politiques de l’eau se font au service des usagers sur le long terme, elles doivent être pensées sur 15 à 20 ans.
Après avoir rappelé que l’Ardèche a réussi à avoir une avance sur ces questions, il est fondamental de travailler de manière collective pour que le Département reste pionnier sur ce sujet.
Les grands témoins
Après l’ouverture, les intervenants étaient invités à prendre la parole.
Adrien Morenas, député et président de la mission d’information sur la ressource en eau, était présent. Il a exprimé les difficultés engendrées par le dérèglement climatique qui est là et qui est palpable. La marque de l’homme a fait changer le climat comme jamais en 10 siècles, avec énormément de répercussions sur l’eau. Il a tenu à rappeler l’importance de la réutilisation des eaux usées. Ces dernières sont pour l’instant largement sous exploitées. Avoir recours à de l’eau potable pour de nombreux usages qui pourraient être réalisés avec des eaux usées relève du gaspillage qu’il est nécessaire de terminer.
A travers son rapport sur l’eau, il a mis en avant l’importance de repenser la gouvernance et les usages de l’eau.
Sophie Allain, sociologue à l’UMR INRA, a pris la suite de ces propos. Pour elle, il est nécessaire de renégocier l’eau comme un bien commun. L’eau fait partie du patrimoine commun depuis 1992. On en recherche une gestion durable pour l’ensemble des usages même si parfois cela vient s’opposer à certaines activités comme la gestion des canons à neige, l’irrigation excessive, … Il y a une transformation réelle des pratiques de gestion avec une meilleure coordination des acteurs locaux et un plus grand dialogue.
La gouvernance de l’eau va devoir faire face à des conflits d’usage de plus en plus durs. Elle a mis en avant la difficulté entre la mise en œuvre d’actions cohérentes d’un point de vue technique et les politiques publiques de long terme. Il faut mettre en lien les territoires, créer une synergie entre les décideurs et le public. C’est un enjeu fondamental notamment pour les Contrats de transition écologique. L’eau est un bien commun mais un bien commun implique le besoin d’une action collective entre les acteurs qui doivent construire une communauté sur la base de valeurs partagées. Les instances de gouvernance de l’eau sont au cœur de cette réflexion. En élargissant les arènes de dialogue et les personnes inclues dans ces débats, il faut rechercher l’engagement du plus grand nombre pour permettre le développement de processus de négociation intégrative ouverts.
Cette partie consacrée aux grands témoins accueillait également Yannick Prebay de l’Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse et de Murielle Exbrayat, cheffe service planification à la délégation de Lyon.
Yannick Prebay a tenu à rappeler l’importance des dérèglements climatiques qui apparaissent d’ores et déjà. En ayant déjà quasiment dépassé l’effet de seuil, il est indispensable de mettre en place des sociétés résilients, à même de s’adapter aux dérèglements climatiques. La banquise ne se reforme plus l’hiver : tous les signes sont au rouge et l’anthropocène est avéré. L’eau, c’est l’alpha et l’oméga de tout. Il faut un message d’avenir qui inclut ces changements climatiques.
Murielle Exbrayat est revenue sur les données de l’agence de l’eau qui permettent d’envisager plus précisément les futurs travaux à mener sur la gestion de l’eau. De l’évolution du débit du Rhône, l’évolution de la faune et de la flore aquatique, à l’hydrologie qui vont transformer en profondeur nos usages.
Pour l’adaptation, il faut retenir 3 grands axes :
- Rétention d’eau dans les sols
- Lutte contre le gaspillage d’eau
- Redonner un espace de bon fonctionnement aux milieux
60 mesures ont été formulées dans la stratégie d’adaptation de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée. La gouvernance, les techniques d’exploitation, la restauration des milieux aquatiques, autant d’éléments essentiels pour mettre en œuvre une transition hydrique complète.
Il y a un degré d’urgence : il faut agir plus vite et plus fort en prenant en compte les vulnérabilités de chaque territoire. Concrètement, dans les territoires il faut organiser une concertation pour favoriser la prise de décision toujours plus adaptée. Il faut également une ambition territoriale qui passe par une stratégie politique. Il faut conserver des marges de manœuvre pour le futur en optimisant ce qui existe d’ores et déjà. En dernier ressort il faut mobiliser de nouvelles ressources qui doivent être mesurées sur le long terme (40 ans).
1 milliard d’euros sur les 6 prochaines années seront mobilisés pour financer ces actions sur le bassin Rhône Méditerranée.
Nathalie Landay est revenu sur le fonctionnement des cours d’eaux. Elle a pu présenter les risques qui pèsent sur les cours d’eau du Département. Les évolutions différentes d’un cours d’eau à l’autre nécessitent une adaptation des usages mais aussi des restrictions encadrant ces derniers. Il ne faut pas oublier qu’en cas de manque c’est l’accès à l’eau potable et celle à usage sanitaire qui passe en priorité. Cela impacte de fait les autres secteurs tels que l’agriculture, maraîchage, industries, ….
Globalement les cours d’eau sont en bon état dans le département. Un des objectifs est de les maintenir dans cet état en prenant en compte les changements climatiques qui apparaissent. Nathalie Landay est revenue sur les données chiffrées des cours d’eaux ardéchois avec les grands écarts qui existent entre eux. On peut constater une réduction parfois importante des débits d’eau qui sont régulièrement utilisés pour des activités humaines. Ces dernières viennent parfois mettre certains bassins en situation de crise.
Ateliers et restitution
La fin de la matinée était consacrée à deux ateliers :
- Atelier 1 : Comment agir pour rendre les milieux naturels et leur biodiversité moins vulnérables face aux changements climatiques ?
- Atelier 2 : Quelles seront les ressources en eau de demain ? Comment mieux gérer et partager ces ressources ?
Après la pause déjeuner, deux nouveaux ateliers étaient proposés aux participants pour débuter l’après-midi, en compagnie ds élèves du collége Henri Ageron de Vallon-Pontd'Arc venus donner eux-aussi leurs idées :
- Atelier 3 : Efficacité hydrique : quelles solutions techniques innovantes pour réduire les prélèvements et les consommations en eau (avant le robinet) ?
- Atelier 4 : Sobriété hydrique : comment adapter nos usages pour réduire les consommations en eau (après le robinet) ?
Une restitution en plénière était organisé pour partager les précédentes réflexions à l’ensemble des participants. Les réflexions de l’atelier 1 ont fait remonter plusieurs thèmes à prendre en compte dans la transition hydrique :
- L'éducation, la communication, l'information et la sensibilisation
- Les actions directes des pouvoirs publics (leur transversalité et leur cohérence)
- Le travail sur les fonctionnalités naturelles
- La pollution, qui est à prendre en compte avec les pollutions nouvelles
- L'urbanisme et le foncier .
L'atelier 2 a permis d'aborder la question des barrages et de l’économie de l’eau notamment la non-consommée. Les thèmes qui ont été abordés étaient les suivants :
- L'entretien et la perte sur le réseau d’eau potable
- L'importance de la gouvernance
- L’expérimentation de nouveaux modes d’aménagement et d’urbanisation
- La nécessité de mieux connaître les ressources
- L’importance de la protection des eaux souterraines
- Le besoin d’une capacité de décision politique à la bonne échelle
- La nécessité d’améliorer l'efficience des usages
- L’urgence d’éviter de prendre en compte ses intérêts et changer son comportement : ne pas oublier que l'eau est un droit commun.
L’atelier 3 était consacré aux solutions techniques pour réduire les consommations. 2 principales solutions ont émergés chez les jeunes :
- Systématiser la récupération des eaux de pluie
- Développer le compostage à la ferme avec un épandage sur un maximum de zone de culture
3 autres solutions importantes ont pu ressortir de ce troisième atelier :
- Réutilisation de l'eau
- L'apport technologique avec les capteurs les réseaux et compteurs intelligents qui permettent de mieux gérer la consommation d'eau
- L'action des pouvoirs public avec peut être la mise en place d'une stratégie foncière mais aussi la tarification et l'échange de bonnes pratiques
Pour l'atelier 4, des solutions comportementales ont été pensées comme l'utilisation de capteurs intelligents pour ne pas gaspiller l'eau. L’importance pour l’avenir est de s'adapter à l'eau.
Pour clôturer cette journée, Adrien Morenas, Christine Malfoy, Laurent Ughetto et étaient présents aux côtés de Laurent Lenoble, secrétaire général de la Préfecture de l’Ardèche.